TUTTI !
Musiciens des orchestres et des chœurs des maisons d’opéra, ne laissez pas votre avenir se jouer sans vous.

Du colloque «New Deal» à la mission Sonrier : donner les réponses avant de poser les questions

Le 16 novembre dernier, à l’initiative de, la Fédération des Ensembles Vocaux et Instrumentaux spécialisés  (FEVIS) s’est tenue la 5ème édition de «New Deal», rencontres professionnelles de la Musique.

Ce colloque n’aurait pas attiré notre attention, si, au cours d’une des tables rondes, Jacques Toubon, le Président de la FEVIS, Caroline Sonrier, la Directrice de l’Opéra de Lille et future chargée de la mission sur l’art lyrique en France, mais aussi Sylviane Tarsot Gillery, Directrice de la Direction Générale de la Création Artistique du Ministère de la Culture n’étaient pas intervenus à plusieurs reprises et avec insistance pour vanter les mérites d’une politique d’invitation, voire de résidence des ensembles indépendants dans les maisons d’opéra permanentes.

Tout le reste du «débat» fut l’occasion de réentendre tous les poncifs cent fois rabâchés sur les mérites comparés des ensembles permanents et des ensembles dits «indépendants» : des structures orchestrales et lyriques permanentes sclérosées face à des ensembles spécialisés innovants, modernes, créatifs qui pourraient apporter une dimension plus moderne à de vieilles institutions poussiéreuses.

Tout cela pourrait prêter à sourire. Il y a bien longtemps que le SNAM-CGT prône la solidarité entre permanents et intermittents et que parmi les artistes des orchestres et chœurs permanents, la diversité des répertoires ne fait plus débat. Nous sommes tous respectueux des talents des artistes travaillant au sein de ces formations. Et personne ne souhaite se laisser entrainer dans ces polémiques qui prévalaient il y a 30 ans entre les «classiques» et les «baroqueux», alors que beaucoup d’entre nous travaillons régulièrement avec des chefs «spécialisés» dans ces répertoires.

Mais que ce soit précisément Caroline Sonrier, Directrice de l’Opéra de Lille, qui ait été choisie quelques semaines après la tenue de ce colloque pour présider aux travaux de la mission sur l’art lyrique en France ne doit donc rien au hasard. Alors que la FEVIS qui regroupe les ensembles dits indépendants revendique des aides financières au Centre National de la Musique pour favoriser les résidences ou les co-productions avec les maisons d’opéra permanentes, on peut raisonnablement craindre que l’on prenne prétexte du soutien légitime aux  ensembles spécialisés pour voir émerger de cette mission une conception très libérale des maisons d’opéra qui ne seraient plus considérés que comme des lieux d’accueil de spectacles livrés «clé en main». Le danger d’une telle évolution est évidemment dans un siphonage des budgets des opéras permanents dont certains sont déjà extrêmement fragilisés. Mais aussi dans une remise en cause d’un modèle partagé par toutes les grandes maisons d’Opéra du monde autour de la permanence de l’emploi.

On le voit, plus que l’avenir de l’art lyrique en France, la véritable question qui nous est posée est celle-ci : qu’est-ce qu’une maison opéra ? Une structure permanente de création implantée sur un territoire avec des équipes de création de décors, de costumes, un orchestre et un chœur permanent, éventuellement un ballet pour des missions de service public ou un lieu d’accueil ou de résidence temporaire pour des structures invitées dont une grande partie de l’équilibre financier repose sur l’assurance chômage et le mécénat ?

Mars 2021

Cet article fait partie d’un dossier TUTTI ! en 5 chapitres, dont voici la liste :

TUTTI ! : Introduction

(Cette page) TUTTI ! Du colloque new deal à la mission Sonrier 

TUTTI ! Oui, un soutien aux ensembles spécialisés est indispensable mais pas au prix d’une fragilisation des structures permanentes

TUTTI ! Mission «orchestres symphoniques» : vers un nouveau pacte pour poursuivre le plan Landowski ou pour revoir à la baisse les conditions de travail des musiciens ?

TUTTI ! Quelques témoignages parmi beaucoup d’autres recueillis au cours de ces derniers jours attestent de l’apport essentiel des artistes lorsqu’il s’agit de l’avenir de nos professions. Nous attendons les vôtres avec impatience…