XXIIIè congrès du SNAM-CGT – 16 et 17 mai 2022, Paris – La Flèche d’Or

RAPPORT D’ORIENTATION

Que nous interprétions la musique ou l’enseignons, quelle que soit notre esthétique, nous, les professionnel·les de la musique que le SNAM représente vivons dans une société construite sur des rapports de domination, particulièrement ceux générés par le capitalisme et le patriarcat.

Nous subissons la violence de la concurrence et ce dès la petite enfance, où notre statut social va conditionner notre entrée dans la société, dans les meilleures écoles et universités, les meilleurs conservatoires ou écoles de musique et de danse, et où notre genre ou notre racialisation, pour des raisons de construction sociale, de préjugés, seront un déterminant pour la poursuite de nos carrières musicales, professionnelles ou amateures.

La lutte va ensuite se poursuivre tout au long de la vie : pour un salaire décent, pour une sécurité de l’emploi, pour des conditions de travail dignes, il faudra jouer des coudes, et celleux qui s’en sortiront le mieux, qui seront considérés comme les plus méritants seront bien souvent celleux que la naissance a prédisposé à réussir.

Face à ces injustices, ces inégalités, c’est l’ensemble des dominé·es qui doit réagir et faire front, et la CGT, à travers son projet de société juste et égalitaire, peut être un des moteurs déterminants de l’émancipation sociale face à la captation de la richesse et du pouvoir par une caste de dominants. La sécurité sociale généralisée, le nouveau statut du travail salarié, la sécurité sociale professionnelle, la retraite à 60 ans, l’accès à la formation tout au long la vie sont autant de droits à conquérir qui rejailliront positivement sur nos vies et nos métiers, tant sur les conditions concrètes de les exercer que sur l’accès par tous les publics à une offre de spectacle ou de pratiques musicales diversifiées. Derrière cette lutte que le SNAM-CGT doit toujours garder en ligne de mire, nombreux sont les combats que nous avons à mener pour les professionnel·les de nos secteurs, dont la situation s’est spectaculairement dégradée durant cette « crise COVID » dont nous ne voyons pas la fin et qui a mis en lumière notre situation de « non-essentiel·les », perpétrée depuis des années par les gouvernements successifs qui préfèrent faire de la musique une marchandise plutôt qu’un bien commun.

Bien sûr, nous faisons nôtres et nous nous mobiliserons pour les revendications interprofessionnelles portées par la CGT ainsi que celles qui concernent notre secteur d’activité portées par la FNSAC-CGT. Ce document n’a pas vocation a les rappeler systématiquement, mais va s’attacher à détailler les revendications propres aux professionnel·les de la musique, enseignant·es et interprètes. Elles sont la base de notre syndicalisme de conquête et tout particulièrement les premiers pas vers un nouveau statut du travail salarié et une sécurité sociale professionnelle. Ce document s’inscrit dans la totale continuité, précisions et évolutions des orientations adoptées lors de nos précédents congrès.

NSTS SSP : la conquête de droits individuels garantis collectivement, cumulables et transférables, attachés à la personne du·e la salarié·e.

L’ensemble des droits sociaux est actuellement totalement pieds et poings liés à l’emploi. Pas d’emploi, pas de droit ! C’est le transfert de ces droits à la personne du·e la travailleur·se qui est revendiqué. Cela concerne l’ensemble des salarié·es, des travailleur·euses, y compris sous statut, les auteur·trices, compositeur·trices, tout comme les travailleur·euses indépendant·es qui ne relèvent pas d’un fonctionnement d’entreprise capitalistique et qui relèvent de fait d’une subordination juridique. Ces droits liés à l’emploi transférés sont ceux issus du code du travail, des conventions et accords collectifs, du contrat de travail. Cela va joindre ces droits à ceux déjà liés à la personne, allocations familiales, couverture maladie ou pension de retraite. Ces droits doivent être étendus à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes mais aussi à tout ce qui favorise la transition écologique. La transférabilité de ces droits attachés à la personne est donc plus large que les droits transférables dans les fonctions publiques et liés au grade. Il s’agit bien de garantir, à chacune et chacun, des droits progressifs, cumulables et transférables au fur et à mesure des mobilités, des évolutions de carrière et de salaires, tout au long de la vie.

1) Le Salaire

Le salaire est aujourd’hui l’objet de toutes les attaques des politiques gouvernementales et patronales, alors que la place des salarié·es dans la création de la valeur n’a jamais été aussi centrale et déterminante. Notre travail génère des richesses qui nourrissent le capital financier et les dividendes, mais aussi les ressources de l’Etat et nos salaires, salaire socialisé (les cotisations et contributions sociales et notre salaire net).

Depuis des années, les politiques salariales, amplifiées par le macronisme ont attaqué le salaire socialisé, reportant sur l’impôt des cotisations sociales dues par les entreprises et nos employeurs (CSG, CRDS, disparitions de cotisations patronales assurance chômage). Les programmes de nombre de candidat·es aux présidentielles proposent d’amplifier ce mouvement pour augmenter les salaires. C’est un jeu de dupe qui vise à diminuer la part des salaires dans les valeurs économiques créées. De plus nous assistons depuis la signature et l’extension de nos conventions collectives et de nos statuts à une stagnation et une baisse en euro constant de nos salaires.

Cela entraîne une baisse du pouvoir d’achat, alors que tout le monde s’accorde pour dire que le niveau de formation augmente, que pour travailler de nos jours il faut avoir toutes les compétences et que la part du travail, le plus souvent salarié, dans la plus-value ne cesse d’augmenter.

Cette stagnation trouve son origine dans le secteur public par le gel du point d’indice, la non-reconnaissance des qualifications et l’augmentation de l’emploi contractuel au détriment des titularisations. Dans le secteur subventionné elle est le fait de la stagnation des financements de l’État et des collectivités territoriales ainsi qu’une absence de revalorisation des salaires réels, les négociations ne reposant depuis 10 ans que sur les minimas, générant un effet « ciseaux ». Partout elle est le corollaire d’une précarité endémique qui met les employeurs en situation de force lors de la négociation des salaires.

Cette question de baisse tendancielle des salaires est surtout le résultat de la remise en cause permanente de l’équilibre obtenu sur la globalité des clauses conventionnelles comme sur le contenu des statuts, au moment de leur signature ou de leur adoption. Cette baisse tendancielle n’est quasiment pas contredite par l’obtention de droits nouveaux. La Cgt avait obtenu une réponse à ce propos par l’adoption en 1952 de l’échelle mobile des salaires. Les salaires comme les points d’indice de la fonction publique étaient indexés sur la hausse du coût de la vie. L’échelle mobile des salaires, après avoir été fragilisée sous la présidence de Giscard, a été définitivement abandonnée ou interdite en 1982 par décision du ministre des finances Jacques Delors (gouvernement Mauroy 2 de Mitterrand).

Par ailleurs les droits sociaux et les salaires sont totalement dépendants de l’emploi. Ainsi pour les salarié·es intermittent·es il n’existe pas de courbe de carrière.

La création musicale, nos pratiques pour pouvoir nous produire sur scène, devant le public, en interprétant tous les répertoires, dont nos créations personnelles, relèvent le plus souvent du travail invisible (composition, arrangement, copies, répétitions etc…). Nous devons oeuvrer et revendiquer de faire entrer ce travail invisible dans la présomption de salariat.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • L’adoption d’une échelle mobile des salaires, avec un point de départ basé sur les salaires ou point d’indice, en euro constant, adoptés lors de la signature des conventions collectives ou des emplois statutaires.
  • Une courbe de carrière pour les salarié·es relevant du CDDU, basée sur une cotisation mutualisée versée dès le·a premier·ère salarié·e sous contrat.
  • La rémunération d’une partie du travail invisible sur la base d’une cotisation sur les salaires des répétitions « ante productio » versée lors des premiers concerts d’une série ou de concerts « isolés ». Cela ne devrait pas concerner les ensembles et tournées dont le producteur, générateur du spectacle, des concerts prend à sa charge les répétitions selon les conventions collectives.
  • L’accès au grade de Professeur au sein de la CCN-ECLAT pour toustes les enseignant·es artistiques et l’augmentation des salaires à un niveau d’indice en rapport avec les compétences requises.
  • L’application de l’ensemble des mesures préconisées par le Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale (CSFPT) en 2018, voté à l’unanimité du collège de représentants syndicaux et d’employeurs territoriaux ; en premier lieu, le passage de toustes les enseignant·es artistiques – dont les musicien·nes intervenant en milieu scolaire font partie – en catégorie A.
  • Le respect des missions des enseignant·es, de leur temps de travail, et de préparation qui ne peut être sous contrôle de l’employeur.
  • L’accès au régime indemnitaire et la prise en compte de l’ancienneté pour les enseignant·es artistiques contractuel·les.
  • L’augmentation des salaires dans les Conventions Collectives Nationales (CCN) du spectacle vivant et le conditionnement des aides publiques à des niveaux de salaires supérieurs aux minimas.
  • L’égalité de salaire entre les hommes et les femmes, l’égalité d’accès à l’emploi ainsi que l’égalité du déroulement de carrière.

2) L’emploi

Le désinvestissement public de ces dernières décennies a rendu encore plus criante la dépendance des artistes interprètes de la musique au secteur marchand. Cela induit mécaniquement de grandes inégalités d’accès à l’emploi. Cela place les artistes dans des situations où elles et ils sont contraint·es d’accepter des propositions aux conditions inacceptables, notamment salariales. Les producteurices de musique sont dans une telle position de force qu’elles et ils n’ont qu’à récupérer les artistes « bankable« , qui ont déjà fait la plus grande partie du chemin dans les réseaux de diffusion, pour les placer sur leurs propres réseaux. Conséquence, les jeunes artistes ou celleux qui pratiquent des musiques dont la diffusion a une faible portée commerciale, sont obligé·es de tout gérer toustes seul·es : communication, publicité, réseaux sociaux, site internet, booking, production, et jusqu’à leurs propres conditions d’emploi lorsque les organisateurs de spectacle n’en assument pas la responsabilité et imposent des factures !

A ce titre, l’affaire « SMART » a démontré l’insécurité juridique – sur laquelle nous alertions depuis longtemps – provoquée par le portage salarial, encore beaucoup trop répandu dans nos métiers. Nous devons poursuivre la lutte contre cette pratique qui met en danger les artistes, sans les pénaliser, mais au contraire en leur donnant des possibilités alternatives.

L’’adoption des cahiers des charges après la promulgation de la loi LCAP, le 7 juillet 2016, avait doté les SMAC d’une responsabilité sur cette question de structuration de l’emploi et de la production.

Le développement ces dernières années de dispositifs divers d’aides à l’emploi, notamment l’emploi direct, d’artistes est grandement à mettre à l’actif du SNAM qui en a porté la revendication et la mise en œuvre. Ces dispositifs doivent encore être complétés pour développer l’emploi de musiciens et de musiciennes en France et à l’export.

Le dispositif du Guichet Unique du Spectacle Occasionnel (GUSO) doit être amélioré pour permettre un réel respect des dispositions conventionnelles applicables aux artistes par tous les employeurs.

Dans un secteur où l’emploi pérenne est déjà à la traîne pour les enseignant·es artistiques, la réforme de la Fonction Publique Territoriale en accélère la précarisation déjà la plus élevée des trois fonctions publiques. Les employeurs publics se sont saisis de la possibilité des CDI au lieu de créer des postes de titulaires. Le nombre ridicule de places ouvertes aux prochains concours en est une preuve. Loin de mettre en œuvre les préconisations du rapport du CSFPT, les employeurs ouvrent des postes d’Assistant d’Enseignement Artistique (AEA), et non d’Assistant d’Enseignement Artistique principal de 2ème classe (AEA principal) ne correspondant pas à de l’emploi enseignant. Nous assistons à une régression sans précédent du niveau d’emploi de nos métiers.

Les institutions permanentes souffrent de la stagnation des financements et il est souvent fait le choix de ne pas remplacer tous les postes permanents pour compenser ce gel en euro constant. Le désengagement progressif de l’État n’a en général pas été compensé par les collectivités. Il est compliqué pour ces structures de survivre sans un plan massif d’évolutions des finances. Il y a encore plusieurs régions qui ne bénéficient pas d’une structure permanente mais s’appuient sur des orchestres « permittents » qui sont en réalité financés en partie par l’assurance chômage.

Un lien plus étroit doit se faire entre les structures de droit privé et les négociations de la CCNEAC (Entreprises Artistiques et Culturelles) car certaines avancées nécessitent d’être mieux discutées pour prendre en compte tous les paramètres.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • L’adéquation entre les besoins territoriaux en terme de création de postes d’enseignant·es et le nombre de places aux concours de la Fonction Publique Territoriale (FPT), en veillant qu’ils soient organisés dans les bons grades, à intervalles réguliers et rapprochés.
  • Le retour de l’obligation de titulariser les lauréat·es des concours.
  • La création d’une nouvelle discipline Intervenant en Milieu Scolaire aux concours de Professeur d’Enseignement Artistique (PEA) de la FPT.
  • Des aides à l’emploi direct, la pérennisation et le développement des aides du Fonds National Pour l’Emploi Pérenne dans le Spectacle (FONPEPS) – particulièrement « phono » et petites salles, le déploiement du GIP (Groupement d’Intérêt Public) « Cafés Cultures » sur tout le territoire et l’extension de son champ à d’autres organisateurs occasionnels.
  • L’attention et la reconnaissance par les pouvoirs publics du champ des employeurs occasionnels, de son importance en matière d’emploi et de lien social, de ses besoins de structuration.
  • La création de structures permanentes là où des ensembles « permittents » existent.
  • Une revalorisation des financements de nos structures permanentes.
  • Un échange plus important avec les ensembles de droit privé.

 

3) Un travail décent 

La dégradation continue des conditions de travail , par la précarisation , la stagnation des rémunérations malgré l’inflation, la crise sanitaire et son corollaire de restrictions, créent des situations de détresse inacceptables.

La loi de transformation de la fonction publique a acté la disparition des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), qui deviennent une simple partie des comités techniques (CT). L’accès aux services de médecine de prévention est de plus en plus difficile, et les problématiques particulières des musicien·nes et danseureuses sont le plus souvent complètement ignorées.

Alors que les conséquences des restrictions de ces deux dernières années frappent de plein fouet les artistes intermittent·es, il est plus que jamais nécessaire de lutter contre le travail illégal. Le Plan national de lutte contre le travail illégal 2019-2021 désignait clairement le secteur du spectacle comme prioritaire, et il mobilisait les différents corps de contrôle pour mener des actions conjointes au niveau national et local, avec une promesse de 24 000 opérations de contrôle par an.  Pourtant, les militant·es du SNAM ont constaté que les signalements n’ont que rarement (voire jamais) mené à des opérations de contrôle.

Au « travail au noir » se substitue maintenant bien souvent une forme particulière d’uberisation, où les producteurs et organisateurs de spectacle se retranchent derrière une facture et un contrat de cession pour imposer aux artistes de gérer elleux-mêmes les conditions de leur emploi, les obligeant à choisir la moins mauvaise des solutions entre l’association de production fantôme, la société de portage, ou la micro-entreprise. Elles et ils se retrouvent ainsi privé·es de l’ensemble de leurs droits, notamment le droit syndical, l’accès à la représentation du personnel. A fortiori à travers ces pratiques les producteurs se permettent de ne pas respecter les conventions collectives.

Nous avons œuvré à faire entrer du travail invisible et de la transférabilité des droits dans le champ de la présomption de salariat et des conventions collectives. C’est le cas des dispositions conventionnelles sur le droit à répétition dans les bals. Cette conquête n’a pu voir le jour, malgré les propos d’Audiens dans son élaboration. Aujourd’hui nous butons sur la création du fonds mutualisé « employeur ». C’est pourtant un objectif décisif pour la construction de droits transférables comme la courbe de carrière-ancienneté pour les salarié·es intermittent·es ou la poursuite de la volonté de faire évoluer du travail invisible vers la présomption de salariat (éléments de la Sécurité Sociale Professionnelle).

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir:

  • La création partout sur le territoire français d’un « Service public de la production musicale au service de la diversité, de la professionnalisation, de l’émergence et de l’écoresponsabilité », ou plus simplement : « Producteur Public ». Ces Producteurs Publics, décrits plus en détail à l’annexe 1, assureront la production d’artistes de la musique non produits. Ils veilleront à leur professionnalisation et à la consolidation de leur environnement professionnel, dans un cadre responsable. Ils leur permettront d’avoir accès aux divers guichets de subventions, pour qu’elles et ils puissent financer des résidences et des créations et faciliter la diffusion de leurs spectacles. Nous agirons pour la création de structures ayant ces missions et des budgets pour les mener à bien. (voir Annexe 1 du rapport : « Le Producteur Public », qui est une première approche)
  • Un encadrement du contrat de cession empêchant son recours lorsqu’il n’est pas justifié par la présence d’un producteur réel du spectacle.
  • L’extension du champ du GUSO aux petites entreprises de spectacle.
  • L’élaboration et la mise en oeuvre de « fonds mutualisés employeur » dont un dans le champ du spectacle occasionnel. Il existe un tel fonds dans notre champ : la caisse des congés spectacle pour laquelle une évolution s’impose.
  • Des moyens pour que les syndicats du SNAM luttent contre le travail illégal, en les soutenant dans leurs relations avec les organismes de contrôle, dans la mise en place de conventions territoriales, dans leurs actions en justice.
  • Une augmentation des ressources des différents corps de contrôle pour lutter efficacement contre le travail illégal.
  • Des dispositifs de résorption de l’emploi précaire, pour répondre à l’urgence dans nos filières impactées fortement par les CDD abusifs et temps partiels subis, pour obtenir des titularisations dans la FPT.
  • Des politiques de recrutement qui respectent la loi : fonctionnaires dans le public, CDI dans le privé chaque fois que c’est possible, application de la loi pour toutes les Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) ; quasi inexistantes pour le Certificat d’Aptitude (CA).
  • La fin de la possibilité pour l’employeur de réduire le temps de travail des fonctionnaires et agents publics de 10% unilatéralement.
  • L’ intégration dans les plans de prévention des risques professionnels des spécificités des artistes, notamment enseignant·es : prévention des troubles musculo-squelettiques, prise en charge de protections auditives, accompagnement des retours de congés maladie, maternité.
  • Des plans de lutte contre le harcèlement et les discriminations de toutes natures, par la formation des agents publics, salarié·es, encadrant·es, la désignation de référent·es égalité dans toutes les structures privées comme publiques, par la mise au point d’outils de contrôle statistiques des progrès attendus.

4) Le Service Public et son déploiement

Offrir aux populations un service public des arts et de la culture doit rester la pierre angulaire des politiques publiques en faveur de la musique en France. La musique, sous toutes ses formes, dans toutes les esthétiques doit être portée au-devant du plus grand nombre. Toutes les catégories de la population, et notamment celles qui n’appartiennent pas a priori au public des institutions et structures chargées des missions de service public doivent avoir accès à notre art, que ce soit en assistant à des spectacles ou en apprenant à le pratiquer dans des conditions satisfaisantes.

Nous avons travaillé depuis le « concert des mille », le 21 mai 1995, à la revendication d’une loi d’orientation et de programmation. Cette orientation a été reprise par la fédération et nombre d’organisations d’employeurs. Cela a abouti, in fine, à la loi LCAP, loi simple sans volet de programmation. Elle a édulcoré bien des dispositions élaborées par un travail collectif exceptionnel de notre union et de ses syndicats. Bien des aspects doivent être remis en avant et enrichis à l’aune de la situation actuelle. En tout état de cause nous devons revendiquer, pour redéployer et développer le service public des arts et la culture, comprenant son volet enseignement artistique spécialisé, dans les conservatoires et écoles de musique et de danse, une loi de programmation quinquennale.

Les enseignant·es artistiques (AEA et PEA) sont chargé·es de missions d’enseignement dans leur spécialité, ou des missions prévues dans l’article L. 911-6 du code de l’éducation conformément aux dispositions statutaires. Ces missions sont régulièrement remises en cause par les employeurs et le Ministère de la Culture, ce que le SNAM combat sans relâche. Nous réaffirmons que l’enseignement artistique spécialisé est un vecteur essentiel d’accès à la culture : le cadre statutaire qui le définit doit donc être défendu, et les conservatoires doivent disposer des moyens permettant leur bon fonctionnement et garantissant l’égalité d’accès à cet enseignement. La réforme des conservatoires, imposée par le ministère sans la moindre concertation avec les organisations syndicales d’enseignant·es, détourne le principe de démocratisation de la musique pour aboutir à une multiplication de parcours et à une inégalité de traitement envers une partie des enfants, qui se verraient privés d’un véritable enseignement. C’est tout le sens de la revendication du SNAM-CGT de rendre obligatoire le cycle d’apprentissage de la musique à l’école et le redéploiement des conservatoires sur tous les territoires.

L’Éducation Artistique et Culturelle (EAC), portée en étendard par de nombreux gouvernements, n’a pas vocation à être portée par des entreprises de spectacle. Nous nous inscrivons en faux contre l’idée que n’importe quel·le artiste interprète est par nature formé·e à intervenir face à des enfants ou des adolescent·es. Mais l’EAC, qui ne peut non plus s’assimiler à une prestation de service, ne peut pas être confiée à des entreprises du secteur marchand.

Les missions confiées aux orchestres et maisons d’opéra sont avant tout l’excellence artistique et le déploiement auprès de tous les publics. A ce titre ils relèvent de la subvention et non du financement du CNM dont ce n’est pas la nature.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

 

  • Plus de moyens pour le service public des arts et du spectacle, de l’État comme des collectivités territoriales, en vue d’une politique ambitieuse de démocratisation et d’émancipation, à destination de tous les publics. Cela passe par l’élaboration et l’adoption d’une loi de programmation quinquennale.
  • Un budget de l’État pour la culture à hauteur d’au moins 0,5% du PIB, soit 12 milliards d’euros actuellement, contre 4 milliards aujourd’hui.
  • Mettre fin au Pass-Culture, qui fragilise les missions et budgets du ministère en nourrissant des objectifs consuméristes.
  • Sortir des logiques de gestionnaires pour aller vers une offre d’enseignement artistique, via l’école, les écoles de musique et conservatoires territoriaux, accessible à tous les publics, enfants, adolescent·es, adultes.
  • L’interruption du processus de réforme des conservatoires et la mise en œuvre d’une réelle concertation sur l’avenir de l’enseignement artistique.
  • La création d’un diplôme national délivré par les conservatoires en fin de cursus pré professionnel, en remplacement du Diplôme d’Etudes Musicales et du Diplôme National d’Orientation Professionnelle.
  • Que l’Éducation Artistique et Culturelle (EAC) soit confiée à des professionnel·les formé·es, et que l’emploi permanent y soit la norme.
  • Que l’État et les collectivités territoriales puissent doter tous les établissements d’enseignement du premier degré d’un·e musicien·ne intervenant·e relevant de l’enseignement spécialisé afin d’offrir un apprentissage de la musique de qualité à tous les enfants de la République. Cette exigence d’un droit à l’éducation musicale pour toutes et tous n’est pas contradictoire avec les dispositifs divers de pratique de la musique en ensemble dans le cadre scolaire, ni avec le développement de classes à horaires aménagés pour les élèves les plus motivés. Il en est complémentaire.
  • Le maintien de l’exclusion du secteur « classique » de la taxe sur les spectacles du CNM et la continuation du financement d’Etat par le biais de la DGCA.
  • La création d’ensembles permanents sur tous les territoires où il n’en existe pas.

5) La lutte contre la précarité

Pour les interprètes comme pour les enseignant·es, le recours à des contrats courts ne cesse de se multiplier, maintenant dans une situation de précarité – et donc de pression sociale – des musicien·nes occupant pourtant des postes permanents. Cela vaut dans les ensembles mais également au sein des écoles de musique et conservatoires, où les recours au CDD se multiplient, où les agents sont maintenu·es à temps non-complet (avec des clauses abusives), ou titularisé·es sur une partie de leur temps de service seulement (le reste étant comptabilisé en heures complémentaires ou supplémentaires – elles-mêmes calculées abusivement sur la base d’un taux horaire à 35h par semaine). La logique de développement de classe est bien souvent ralentie voire stoppée pour des raisons budgétaires, et les personnels embauchés à temps très partiel sont les premiers à en subir les conséquences.

L’assurance chômage sert de béquille tant pour des ensembles permanents qui ont abusivement recours au CDD d’usage, que pour des conservatoires publics où des agents enchaînent des contrats de 10 mois et s’inscrivent à Pole Emploi durant l’été. Nous ne pouvons l’accepter, ni pour la sécurité de notre assurance chômage, ni pour celle des salarié·es qui sont ainsi perpétuellement maintenu·es en situation de perdre leur emploi sans contrepartie, et ne bénéficient pas de l’ensemble des droits sociaux qui devraient être attachés à la permanence de leur contrat.

La précarité salariale doit rester cantonnée aux circonstances dans lesquelles elle est incontournable, c’est à dire ne jamais exister lorsque nous sommes employé·es à des activités durables. Pour toutes ces raisons nous travaillons à construire la continuité salariale, avec son volet « salaire socialisé » : la Sécurité Sociale Professionnelle.

Il y a un enjeu considérable à construire un socle commun de garanties collectives entre les différentes conventions collectives. C’est la base du Nouveau Statut du Travail Salarié. Ainsi nous pourrions revendiquer dans toutes nos conventions collectives un accord « égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, prévention et lutte contre les harcèlements et violences sexistes et sexuelles », un autre pour inscrire nos activités professionnelles dans la transition écologique solidaire, enfin un accord sur la démocratie sociale et syndicale avec la prise en compte du vote et de l’éligibilité des salarié·es intermittent·es et des vacataires dans le cadre des élections professionnelles.

Les restrictions liées à l’épidémie de COVID-19 ont très fortement accentué les difficultés que rencontrent les artistes des musiques dites « actuelles » et du jazz : l’annulation de festivals, les déprogrammations, les reports, ont renforcé l’effet de concentration des programmations vers un petit nombre, au mépris de la diversité musicale. Les restrictions budgétaires empêchent de financer des répétitions, des créations, qui se font bien souvent bénévolement – ou plutôt financées elles aussi par l’assurance chômage. De nombreux·ses artistes ne s’en sortent plus et l’époque connaît beaucoup de reconversions professionnelles. L’insertion professionnelle des jeunes est plus difficile que jamais – y compris dans les orchestres de droit public où il faut passer par 6 longues années de CDD avant d’être CDIsé·e – et la crise a accentué l’écart entre hommes et femmes dans cette course à l’emploi.

Le gouvernement Macron a porté des coups violents contre la Fonction Publique et plus singulièrement contre le versant territorial : recours accru aux contractuel·les, fusion des instances représentatives du personnel, développement de la rémunération au mérite, remise en cause des accords favorables à la durée du temps de travail.

Nous combattons par principe toute remise en cause de la présomption de contrat de travail, conquise par la grève, pour tous les artistes du spectacle se produisant en France telle qu’elle existe aujourd’hui. Nous réfutons de la même manière tout discours sur une inéluctable évolution du statut de fonctionnaire vers celui de contractuel. Le SNAM se bat pour le recrutement de fonctionnaires et l’ouverture de concours correspondant aux besoins du service public.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • La fin des pratiques de « permittence » dans les ensembles, en particulier ceux qui sont financés par de l’argent public. La permanence de l’emploi doit redevenir la norme et l’assurance chômage n’a pas vocation à financer les politiques culturelles.
  • Des périodes d’emploi plus longues (création, production, diffusion de spectacles et action culturelle) pour les artistes des ensembles dits « spécialisés ».
  • La création de CDI de droit public dès l’embauche pour les artistes du spectacle relevant de la fonction publique territoriale et ne bénéficiant pas de cadre d’emploi, à l’instar des dispositions concernant la fonction publique d’État, plutôt que les 6 années de CDD reconductibles en place aujourd’hui.
  • Que les remplaçant·es dans les ensembles de droit public puissent bénéficier des mêmes droits que leurs collègues du privé, qu’il s’agisse des conditions garanties par la CCNEAC comme de l’accès aux droits sociaux.
  • Que l’emploi sous statut soit la règle pour tous les personnels et pour les artistes musicien·nes enseignant·es dont les diplômes et les concours demandent un investissement personnel et professionnel considérable. L’enseignement artistique, la pédagogie, les projets des établissements et leurs directions doivent rester l’affaire d’artistes professionnel·es formé·es, diplômé·es et recruté·es sur la base égalitaire du concours.
  • Compléter le chantier de la couverture conventionnelle de notre activité.
  • Dans cet esprit, construire un socle commun de garanties collectives sur 3 thématiques : égalité professionnelle – prévention et lutte contre les harcèlements et violences sexistes et sexuelles, inscrire nos activités professionnelles dans la transition écologique, enfin la démocratie sociale et syndicale avec la prise en compte du vote et de l’éligibilité des salarié·es intermittent·es. Ce serait donc l’acquisition d’un droit syndical pour toutes et tous quel que soit la nature du contrat de travail.
  • Porter une attention particulière aux structures d’enseignement de droit privé, dont le développement a été assez anarchique ces dernières années, pour une amélioration des conditions d’emploi et de travail.
  • Défendre fermement l’idée d’un service public de l’Éducation Artistique et Culturelle plutôt que le recours à des structures privées dont les financements sont par définition aléatoires et les objectifs pas nécessairement pédagogiques ni éducatifs (plutôt liés à l’image de marque qu’ils souhaitent se créer).

 

6) L’accès à la formation professionnelle

 

La loi pour la Liberté de Choisir son Avenir Professionnel (LCAP) votée en 2018 et si mal nommée a abouti à affaiblir considérablement le droit à la formation professionnelle des salarié·es et en particulier des artistes travaillant dans le secteur privé. Par contrecoup elle a fragilisé les centres de formation professionnelle qui emploient beaucoup d’artistes enseignant·es, ces écoles ne trouvant plus leur économie faute de financement des formations continues.

Dans le secteur public l’absence de formation professionnelle réellement adaptée aux artistes est régulièrement mise en exergue sans qu’il n’y soit jamais réellement remédié :

Dans la fonction publique territoriale la formation tout au long de la vie soi-disant obligatoire reste soumise au bon vouloir des élu·es alors que le métier d’enseignant·e nécessite une remise à niveau continuelle des compétences professionnelles.

Les budgets alloués aux formations à l’enseignement diminuent d’année en année, mettant en péril une formation supérieure pourtant indispensable à ces métiers.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • La refondation du financement de la formation professionnelle.
  • Le financement des centres de formation professionnelle d’artistes.
  • Des possibilités de prise en charge hors CPF (Compte Personnel de Formation) de formations courtes, essentielles mais ne répondant pas aux impératifs de certification ou de qualification imposées par et avant la réforme LCAP.
  • Un financement pérenne et conséquent des formations à l’enseignement.
  • Un accès de plein droit à une offre de formation adaptée, proposée par le Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT), pour les enseignant·es artistiques de la fonction publique territoriale et les interprètes.

7) La lutte pour l’Égalité

L’inégalité entre les hommes et les femmes dans le secteur musical est criante. Même dans le secteur dit « classique » où les femmes sont très représentées, force est de constater qu’elles n’accèdent que de manière exceptionnelle aux postes de direction d’ensembles et qu’elles restent anormalement minoritaires parmi les solistes instrumentistes invité·es. Nous mènerons le combat de l’égalité, qu’il s’agisse d’accéder à la profession, aux responsabilités ou aux rémunérations.

Le secteur des musiques actuelles est le moins inclusif pour les musiciennes. Les chiffres des instrumentistes sur les plateaux sont encore très anecdotiques. L’évolution de ces chiffres depuis les rapports « Reine Prat » est très faible. Ce contexte de non-mixité est un terrain fertile pour les violences sexistes et sexuelles.

Le genre n’est pas le seul facteur de discrimination, l’absence de diversité ethnique, sociale ou territoriale s’observe partout, particulièrement dans les secteurs les plus lucratifs de nos professions. Notre secteur professionnel, qui dégage pourtant une image d’ouverture et d’inclusivité, est en fait très loin d’échapper aux phénomènes de reproduction sociale, tout comme il est loin d’être un milieu accueillant pour les portereuses de handicap. L’accès à la formation ou aux emplois connaît l’ensemble de ces discriminations, alors qu’un « tri » social a déjà été fait dès le plus jeune âge, par la reproduction du capital culturel et l’auto-délégitimisation de celleux qui n’en sont pas porteureuses. Et si la maigre représentation des femmes au sein de nos syndicats est une conséquence directe de ce phénomène, leur moindre participation dans les prises de parole, dans les prises de décision, et plus globalement dans les postes à responsabilité politique, est à porter directement au discrédit de nos organisations.

Une introspection est nécessaire pour évoluer vers des pratiques militantes plus vertueuses, tout comme nous ne devons cesser d’agir vers l’extérieur, dans la négociation collective et l’activisme politique, pour lutter contre toutes les discriminations et violences qui y sont associées.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

 

  • Valoriser et mettre en lumière le travail et les responsabilités assumées par les femmes, ainsi qu’aux personnes issues de « minorités », qu’elles soient directrice d’établissement artistique, directrice artistique de compagnie, cheffe de chœur et/ou d’orchestre, pour ainsi créer des modèles, des références dans l’esprit des jeunes notamment.
  • Organiser l’accueil des publics porteurs de handicaps au sein des établissements d’enseignement artistique spécialisé. Cela passera par la formation des enseignant·es artistiques volontaires et par le financement des heures de cours correspondant à ce nouveau public.
  • Promouvoir la création de référent·es égalité au sein des établissements d’enseignement artistique.
  • Inciter les employeurs à salarier des hommes et des femmes dans des proportions équilibrées, avec des responsabilités similaires, et des rémunérations équivalentes grâce entre autres à la mise en place de bonifications des aides.
  • Obtenir des statistiques genrées sur nos métiers d’interprètes, d’enseignant·es ou de musicien·nes intervenant·es des organisations d’employeurs, de l’état en ce qui concerne la fonction publique, des caisses sociales, des organismes de gestion collective, des ministères nous concernant, du Centre Nationale de la Musique (CNM)…
  • Former les référent·es harcèlement des CSE (Comité Social et Économique). Donner des outils à nos syndicats pour traiter les dossiers de VHSS (Violences et Harcèlement Sexistes et Sexuels).
  • Pour lutter contre l’impunité, adopter dans les branches professionnelles des accords de lutte contre les VHSS qui garantissent l’ouverture d’enquêtes après des signalements.

 

8) Le partage de la valeur

Les artistes sont les premiers créateurs de la valeur dans les entreprises de notre secteur. Elles et ils n’en sont pas souvent les premiers bénéficiaires.

Dans  le secteur de l’Édition Phonographique, mais  plus globalement au sein de toutes les entreprises qui captent notre travail, que ce soit sur scène ou en studio, les producteurs résistent à appliquer le principe d’une rémunération « appropriée et proportionnelle » tel que le prévoit la loi depuis mai 2021.

Mais, même au sein des entreprises du secteur marchand du spectacle vivant, des profits  considérables se réalisent sans que la plupart des artistes n’en perçoivent les retombées.

Cette spoliation doit cesser.

Le partage de la valeur c’est aussi l’adoption d’une taxe pour les GAFAM et les fournisseurs d’accès et de contenus musicaux. Cette taxe doit à la fois financer la production de la diversité artistique et musicale et la rémunération des artistes interprètes et ne pas aller, comme c’est envisagé, vers les seuls producteurs.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • L’adoption dans toutes les branches d’accords encadrant nos rémunérations pour les enregistrements de nos prestations sur scène ou en studio.
  • La conjugaison de rémunérations forfaitaires perçues au moment de l’enregistrement au titre des différentes autorisations avec des rémunérations appropriées proportionnelles, notamment aux recettes d’exploitation, perçues durant toute la période de protection des œuvres.
  • L’adoption dans toutes les branches du secteur marchand de stipulations permettant aux artistes d’être intéressé·es aux bénéfices des entreprises. Au besoin nous revendiquerons auprès des pouvoirs publics des adaptations de la loi pour permettre aux intermittent·es qui sont hors des entreprises de percevoir des sommes au titre de la participation aux bénéfices.
  • Définir pour les artistes musicien·nes non-principaux·ales des rémunérations pour le droit d’autoriser et des rémunérations complémentaires proportionnelles aux recettes d’exploitation du streaming.
  • Parvenir à la gestion collective par un organisme gouverné par les représentant·es des artistes interprètes pour toutes les rémunérations proportionnelles aux recettes d’exploitations instituées par la convention collective nationale de l’édition phonographique.
  • Améliorer nos relations avec les organisations syndicales d’auteur et celles avec les Organismes de Gestion Collective (OGC) des droits d’auteur et des droits voisins pour qu’elles soient plus régulières et aboutissent à des coopérations efficaces, notamment sur le terrain international (SACEM, SPEDIDAM, ADAMI, SACD, SCAM…).
  • La Garantie de Rémunération Minimale prévue au code de la propriété intellectuelle doit permettre d’associer justement les artistes interprètes à l’exploitation en ligne de leurs enregistrements. Cette garantie, nécessairement proportionnelle, doit exister pour toutes les catégories d’artistes musicien·nes.
  • L’adoption d’une taxe GAFAM – fournisseurs d’accès et de contenus.

9) Le syndicalisme

Il n’y a pas de mouvement syndical fort sans un fort taux de syndicalisation ni sans participation du plus grand nombre à la vie de l’organisation et aux mouvements collectifs. C’est sur ce modèle que nous voulons développer le SNAM et ses syndicats.

La politique de formation syndicale du SNAM doit permettre au plus grand nombre possible de militant·es d’affronter les responsabilités syndicales et de déployer notre activité sur l’ensemble du territoire.

Faire connaître le SNAM, ses positions, ses combats et ses actions doit être un objectif constant de notre politique de communication.

Bien que nombre de professionnel·les soient employé·es dans des services publics ou des entreprises dans lesquelles il existe de par la loi ou les conventions collectives du temps de délégation pour les élu·es et les mandaté·es, l’usage n’en fait pas bénéficier réellement les musiciennes et les musiciens, ni nos syndicats, ni le SNAM. Un équivalent de temps de délégation n’existant pas pour les intermittent·es du spectacle, leur engagement syndical est à ce jour entièrement bénévole. Notamment par la revendication et la négociation, nous ferons tout pour renforcer notre organisation en faisant bénéficier nos militant·es d’heures de délégation ou, à défaut, en percevant des compensations financières.

Le SNAM lui-même doit être un lieu accueillant et inclusif, où chaque militant·e trouve sa place et qui ne connaît ni souffrance au travail ni discrimination.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

 

  • Une offre de formation riche et régulière pour les militant·es du SNAM, qui ne devra pas négliger la formation syndicale initiale.
  • Inventer de nouveaux droits là où il en manque, et faire appliquer ceux qui existent déjà, dans les ensembles et dans toutes les entreprises où les salarié·es sont exclu·es ou privé·es du droit à la représentation du personnel.
  • Le déploiement de l’équipe de direction du SNAM, qu’il s’agisse du Bureau Éxécutif ou des militant·es des branches devra permettre de voir le SNAM siéger partout où ses intérêts sont en jeu, que ce soit face aux pouvoirs publics, au patronat, au sein des organismes divers ou au sein des instances de la CGT.
  • Les trois branches d’activité ont vocation à entretenir une activité régulière qui fasse le lien d’une part avec le plus grand nombre de militant·es de nos syndicats locaux et d’autre part avec la direction du SNAM. Cette régularité est un de nos objectifs majeurs. Le SNAM veillera à ce que chacune des trois branches soit également soutenue et représentée, dans ses intérêts légitimes et revendications.
  • Les membres de l’équipe permanente veillent à informer régulièrement les membres de la direction collective du SNAM et les militant·es des syndicats de tous les dossiers importants en cours.
  • Les liens entre l’équipe permanente du SNAM et les membres du Bureau Exécutif doivent être réguliers, notamment afin de mettre l’ensemble des camarades en mesure d’affronter les débats à mener et les décisions à trancher.
  • Le Secrétariat du SNAM se réunit au moins une fois par quinzaine sauf situation exceptionnelle. Les membres du Bureau Exécutif sont informés très régulièrement des débats qui traversent le Secrétariat.
  • Les militant·es du SNAM et de ses syndicats ont vocation à s’engager dans la FNSAC et dans toute la CGT pour y faire vivre nos revendications et renforcer les luttes au niveau professionnel comme interprofessionnel.
  • Dans la suite de l’audit en cours sur les rapports Femmes-Hommes, veiller à respecter ses préconisations, former les militant·es du SNAM-CGT pour éradiquer les comportements marqués par le patriarcat. Parallèlement, viser la parité dans la délégation des responsabilités en interne et en externe.
  • L’organisation interne du SNAM doit évoluer pour une meilleure inclusion de l’ensemble de ses militant·es, une plus grande participation de chacun·e d’entre elleux, une plus grande fluidité de la circulation de l’information et une prise de décision plus horizontale, tant par souci d’efficacité syndicale et de démocratie que pour le bien être des personnes qui militent au sein du SNAM.
  • Le syndicalisme en général et le SNAM-CGT en particulier doivent se vivre comme un laboratoire de la société juste et égalitaire qu’ils prétendent mettre en place. À ce titre les militant·es, les dirigeant·es et les salarié·es du SNAM-CGT ne doivent tolérer aucune sorte de discrimination ni parmi elleux ni dans les enceintes syndicales où elles et ils déploient leur activité. Tout en sachant que la société comme la profession sont le cadre de rapports de domination qui nourrissent des pratiques d’exclusions, elles et ils devront au contraire veiller à ce que les personnes qui en sont les victimes trouvent au SNAM un environnement sain. L’aménagement des conditions de la prise de parole et de la participation aux prises de décisions fera l’objet d’une vigilance particulière à cet égard.

10) Le lien à la profession

Une dérive inquiétante de la société est l’indifférence, voire la défiance des salarié·es par rapport à la chose publique, et le repli sur la sphère privée. L’abstention aux élections professionnelles est souvent importante et quand il s’agit des élections « Très Petites Entreprises » (TPE), elle est massive et ne cesse d’augmenter (94,56% en 2021). L’ignorance des outils et des moyens d’action de la démocratie sociale laisse les musicien·nes sans défense.  Face à la montée de l’individualisme et au rejet de l’action collective, nous devons améliorer le lien avec toustes les musiciennes et les musiciens, enseignant·es et interprètes.

Pour cela, nous devons établir une stratégie de communication globale au service des luttes, externe afin d’améliorer encore notre lisibilité et notre visibilité, et interne pour gagner en cohérence dans le déploiement de notre démarche syndicale, notamment en direction des syndicats membres de l’Union.

Afin de créer un phénomène de « bouche à oreille » favorable, nous devons également établir une présence sur le terrain, en nous appuyant sur les structures de la CGT, et le cas échéant avec les autres fédérations. Les élections professionnelles arrivent en décembre dans la fonction publique territoriale, nous allons informer et encourager un maximum d’artistes enseignant·es et interprètes à intégrer les listes CGT des services publics afin de siéger dans les instances paritaires de leur collectivité.

La communication numérique doit faire partie intégrante d’une vision contemporaine de la presse syndicale, et l’image passéiste des syndicats doit être combattue par la démonstration du contraire.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • Le maintien et le développement des élections TPE. L’État doit donner tous les moyens pour la réussite de ces élections, et aucun·e musicien·ne ne doit être exclu·e des listes électorales.  Elles doivent être établies à partir de l’ensemble des salarié·es travaillant l’année précédant la constitution des listes.
  • Un plan d’Éducation Populaire, organisé par l’État, pour former l’ensemble des salarié·es à la démocratie sociale et les inciter à y prendre part.  Pour les futur·es professionnel·les, ce rôle doit être joué par les formations professionnalisantes.
  • La solidarité internationale est une motivation forte de notre engagement dans la FIM.

11)La diversité culturelle

Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de maintenir les conditions de la diversité artistique et culturelle, de permettre l’existence en France d’une scène vivace et créative constituée d’artistes de la musique qui travaillent et vivent de leur métier. Alors que de véritables mastodontes du divertissement se constituent dans notre pays comme en Europe et dans le monde, les conditions de la concurrence doivent être régulées pour permettre à tous les modèles économiques et aux entreprises de toutes natures de développer leur activité. Cette régulation visant à limiter la concentration verticale et horizontale des entreprises de spectacle, déjà revendiquée par le SNAM au niveau national, doit aussi être portée au sein des instances internationales auxquelles il participe.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir :

  • La limitation par la loi de la taille, des parts de marché et de l’influence des plus grandes entreprises des médias, du divertissement et du spectacle vivant et enregistré.
  • L’attribution des aides du CNM aux entreprises dont le chiffre d’affaire ou les bénéfices ne permettent effectivement pas d’investir sur leurs fonds propres.
  • Que les esthétiques dont l’économie est plus fragile puissent bénéficier d’aides spécifiques au sein du CNM.
  • L’attribution d’aides à l’emploi d’artistes à toutes les productions de spectacles vivants ou enregistrés sur la base du nombre d’artistes employés.
  • La mise en place de COREPS dans toutes les régions administratives.

12) Des droits sociaux

La lutte des néolibéraux contre les conquêtes sociales du XXème siècle s’est considérablement accélérée depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Tout d’abord le basculement de la cotisation chômage vers la CSG justifiait l’exclusion des représentant·es des salarié·es des discussions sur leur régime d’assurance chômage.

C’est avec cette nouvelle autorité, et malgré deux suspensions du conseil d’État, que le gouvernement a fait passer une réforme ignoble de l’assurance chômage, qui ciblait directement les plus précaires en diminuant drastiquement leurs allocations quand elles et ils n’en sont pas tout simplement privé·es. C’est avec le poids de cette réforme que vont être discutés les droits des intermittent·es du spectacle et il y a fort à parier que la lutte sera rude pour ne pas subir une augmentation du seuil d’heures pour être indemnisé·es ou une réforme du calcul des indemnités en défaveur des allocataires, tant l’écart entre les deux régimes est aujourd’hui criant.

La pandémie de COVID-19 a mis en lumière de manière spectaculaire les privations de droits que connaissent les salarié·es intermittent·es concernant les arrêts maladie. La lourdeur administrative, l’apathie des CPAM et leur incapacité constante à calculer correctement les indemnités journalières de maladie ou maternité/paternité/accueil de l’enfant viennent renforcer un système déjà bancal et injuste, qui encourage les salarié·es à ne pas se déclarer en arrêt maladie, voire à continuer de travailler en étant malade, ce qui est plus que problématique en période de pandémie. En effet les règles d’ancienneté pour obtenir une compensation employeur, le plafonnement des indemnités journalières, les jours de carence et le fait que les jours d’arrêt hors contrat ne génèrent pas d’heures pour le calcul des droits au chômage pénalisent les salarié·es à un niveau insupportable.

Si Emmanuel Macron a connu un échec pour sa réforme des retraites, nous savons que ce n’est que partie remise et que les luttes devront continuer pour conserver une retraite par répartition telle que nous la connaissons aujourd’hui, et défendre le droit de partir à la retraite à un âge décent.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

 

  • Un régime d’assurance chômage, géré par les organisations syndicales, protecteur pour toustes les travailleureuses, qui assure une continuité de revenu entre deux emplois et prenne en compte toutes les difficultés que peuvent connaître nos carrières.
  • Par la mise en oeuvre de « fonds mutualisés employeur », doter les allocations chômages des cotisations sociales, le salaire socialisé et donc la continuité des droits sociaux hors de l’entreprise. C’est le premier pas vers la Sécurité Sociale professionnelle.
  • La prise en compte des heures de maladie et de paternité y compris en dehors d’un contrat de travail pour le calcul des droits à l’assurance chômage.
  • Une fluidification des échanges avec les caisses d’assurance maladie pour un traitement efficace et conforme à la loi des arrêts de travail.
  • Une meilleure articulation des régimes d’assurance chômage, notamment pour prendre en compte les artistes interprètes qui enseignent.
  • La fin de l’obligation d’épuiser ses droits au chômage avant d’en ouvrir de nouveaux et la possibilité de prioriser le meilleur régime, au choix du·de la salarié·e.
  • Dans le cadre des orientations de la CGT pour la retraite à 60 ans, obtenir un calcul des pensions qui prenne en compte les périodes de chômage indemnisé pour le régime de base de la Sécurité Sociale, pour mettre fin aux retraites de misère perçues par un grand nombre d’intermittent·es du spectacle.

13)La protection de l’environnement

La prédation de l’humain sur son écosystème est, au même titre que la domination des hommes sur les femmes ou des plus riches sur les plus pauvres, une conséquence directe des politiques libérales et capitalistes basées sur la mise en concurrence perpétuelle des êtres humains entre eux et de l’accumulation des richesses. Sans considération des besoins élémentaires des êtres humains, ces politiques conduisent à produire tout ce qui est possible de l’être tant que cela permette d’en dégager une plus-value et ce à n’importe quel prix humain et écologique.

La musique et plus largement le secteur culturel échappe en grande partie à cette logique car la richesse produite par les artistes répond aux besoins élémentaires de chaque être humain d’élever sa conscience et de créer du lien, par la construction culturelle, entre lui et ses semblables.

L’impact écologique du secteur musical n’est pas nul et doit être sans cesse optimisé mais reste très faible dans l’absolu et encore plus faible  au regard de ce qu’il apporte à  la société en terme de lien socioculturel et à chaque individu en terme de dignité humaine.

Le SNAM-CGT en défendant les artistes et l’activité musicale défend l’idée que le développement du secteur est socialement nécessaire et écologiquement soutenable sur le long terme.

Le SNAM- CGT s’engage dans son fonctionnement propre à mettre en place toutes les pratiques nécessaires à la réduction de son impact sur l’environnement.

Le SNAM-CGT s’attèle à promouvoir auprès des pouvoirs publics  le caractère essentiel du travail des artistes musicien·nes pour l’intérêt commun et dans l’optique d’un « nouveau monde » respectueux de l’humain et de l’écosystème.

Nos métiers ont connu récemment une alerte importante sur le transport des instruments de musique fait à partir d’essences de bois désormais protégées et interdites dans de nombreux pays. Ce sujet nous a amené dans un premier temps à rechercher et revendiquer des aménagements logiques mettant en balance le fait que détenir des instruments anciens de grande valeur et faits avec ces essences de bois ne pouvait logiquement pas faire obstacle à la diffusion de la musique.

Mais au-delà de ces préoccupations premières, cela doit nous amener à rechercher où se situe la bonne pratique professionnelle en terme de protection de la diversité biologique qui se trouve parfois confrontée à celle de la diversité culturelle. De fait, il ne s’agit pas de revenir sur la conception ancienne des instruments mais plutôt d’avoir une réflexion positive qui puisse à la fois favoriser un développement de la pratique musicale respectueuse de l’environnement et de ses impacts sociaux.

Au cours de la seconde période de crise sanitaire, nos camarades du Loiret ont développé un dispositif local d’aide à l’emploi, le FonSAT, favorisant durablement le recours à des équipes artistique et technique locales répondant aux préoccupations écologiques en terme de décarbonatation de l’activité musicale.

Certes l’initiative n’a pas été fondée d’emblée sur cet objectif mais répond quand même aux exigences de la démarche écologique qui recherche les meilleures façons de revoir les pratiques professionnelles. Cette initiative au départ faite dans un but social montre qu’il n’est pas incompatible de les associer avec les préoccupations écologiques sur lesquelles il est indispensable de pouvoir s’interroger.

Si ce n’est qu’une ébauche de ce qu’il serait possible de faire, le SNAM-CGT s’inscrit pleinement dans la démarche écologique que ces deux critères sociaux et environnementaux représentent en terme d’enjeux majeurs pour l’avenir de la profession. Il est donc convenu que tout doit être mis en œuvre pour favoriser des mutations professionnelles permettant à la fois de répondre aux deux questions qui ne peuvent être dissociées pour aboutir.

Le SNAM-CGT doit s’engager à travailler plus encore afin pouvoir répondre autant que possible à ces deux objectifs dans les années à venir.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir : 

  • Le soutien et le développement massif des politiques publiques culturelles au titre de leurs plus values sociales et de leur soutenabilité environnementale, passant notamment par le fléchage des subventions vers des projets et artistes locaux·les.
  • Les budgets nécessaires aux mutations des pratiques des professionnel·les de la musique en vue de la réduction de leur impact écologique.
  • La densification du maillage territorial des établissements publics de la musique (Orchestres permanents, scènes lyriques, salles de spectacles, établissements d’enseignement artistique …).
  • L’obligation pour la SNCF d’accepter les instruments de musique sans supplément.

14) L’international

Les artistes comme leurs œuvres voyagent  sur toute la planète. L’investissement dans l’action syndicale internationale est donc une nécessité. La Fédération Internationale des Musiciens (FIM) est l’outil syndical que les musicien.nes se sont donné·es depuis le milieu du XXème siècle.

Nous proposerons et nous mobiliserons pour obtenir :

  • Une coordination de l’application aux artistes interprètes de la Directive « DAMUN » dans toute l’Union Européenne.
  • L’institution d’une présomption de contrat de travail au sein de l’UE pour tous les travailleur·euses en position de faux·sses indépendant·es.
  • L’intégration au plus haut niveau de la gouvernance de la FIM de camarades issu·es de tous les continents.

Annexe 1 – LE PRODUCTEUR PUBLIC

La société contemporaine met bon nombre d’artistes de la musique dans une situation inextricable : encouragé·es à systématiquement se renouveler, se diversifier, monter ses propres projets, les conditions matérielles rendent quasiment impossible son émergence, ses possibilités de diffusion, a fortiori dans des conditions d’emploi acceptables. La saturation des réseaux privés de production combinée aux pratiques, à tous les échelons, des diffuseurs, crée un effet d’entonnoir où seul·es celleux qui auront su devenir « rentables » – souvent moyennant un coût humain et financier conséquent – peuvent exercer sereinement leur métier d’artiste. Il existe aussi un grand nombre de projets qui ne peuvent être rentables par définition, ce sont par exemple certaines niches musicales où les projets qui ne jouent que dans des petites jauges.

Certain·es musicien·nes sont contraint·es d’exercer une douzaine de métiers différents pour parvenir à monter sur scène ! Et sans structure de production, de nombreux problèmes se posent : comment trouver des financements, pour des créations/répétitions ? Comment gérer une « économie de tournée » ? Comment rémunérer l’ensemble des tâches accomplies (chargé·e de production, de diffusion…) ? Comment accéder au matériel de communication nécessaire pour présenter ses projets à des diffuseurs ?

Cela combiné à l’éternel « chantage à la facture » exercé par des programmateurs peu soucieux des conditions de travail des artistes, ces derniers sont bien trop souvent contraints au « bricolage », qui passe par la création de petites structures associatives, gérées de fait par l’artiste, avec des directions « fantômes », renversant le lien de subordination et faisant reposer sur l’artiste la responsabilité de ses propres conditions d’emploi. Ou alors par l’utilisation de sociétés dites de portage comme la célèbre « SMART », dont il n’est plus besoin de démontrer l’insécurité juridique. Au final d’importants risques psycho-sociaux peuvent affecter les artistes s’auto-exploitant parfois sans lien avec les filières de la profession et en se trouvant de plus en plus isolé·es, voire pour les projets phonographiques dits  « en auto-production » sans réelle protection sociale.

Face à ces constats, le SNAM fait une proposition : la création d’un « Service public de la production musicale au service de la diversité, de la professionnalisation, de l’émergence et de l’écoresponsabilité », que l’on pourrait plus simplement baptiser : « Producteur Public ».

1) LA FORME DES PRODUCTEURS PUBLICS

La forme juridique pourrait être associative, via une délégation de service public, mais un Groupement d’Intérêt Public ne serait pas à exclure.

Des Producteurs Publics pourraient se développer dans chaque région, sous l’impulsion des COREPS, avec un préalable pour que des guichets soient accessibles facilement sur l’ensemble du territoire.

2) LES MISSIONS DES PRODUCTEURS PUBLICS

Sollicité par les artistes et en lien avec tous les acteurs de la région (diffuseurs, réseaux, SMAC…), le producteur public serait en charge des missions suivantes :

2.1) Professionnalisation

  • Soutenir les projets artistiques en leur permettant de monter en gamme par tous les moyens à leur disposition.
  • Informer les artistes sur les subventions adaptées à leur projet et faire des demandes en leur nom.
  • Favoriser l’accès à des moyens de promotion (réalisation de démos, de photos, de site internet, de press book) dans des conditions conformes au droit du travail et aux conventions collectives.

2.2) Cadre professionnel

  • Former les artistes, notamment à leurs droits, à l’encadrement professionnel, aux aides à leur disposition.
  • Former les diffuseurs, notamment à leur responsabilité, au droit du travail, à la réglementation du spectacle vivant, à la présomption de salariat.
  • Encourager l’emploi direct par les diffuseurs lorsqu’il est adapté.
  • Encourager l’émergence des femmes et minorités de genre dans le milieu professionnel.

2.3) Production

  • Estimer la pertinence des budgets, des emplois, des salaires des projets portés par les artistes.
  • Organiser des résidences
  • Gérer des logistiques de tournée
  • Proposer les artistes à des réseaux de diffusion partenaires
  • Prendre en charge les salaires des artistes et technicien·nes : pour des spectacles dans des cadres précis où l’emploi direct n’est pas envisageable, pour des répétitions, et pour le travail de diffusion et de logistique y compris lorsque celui-ci est réalisé par les artistes.

2.4) Responsabilité

  • Participer à la décarbonation de la culture en aidant les artistes à rester sur leur territoire
  • Favoriser l’accès à tous les publics et sur tous les territoires à une offre musicale riche, diversifiée, et de qualité.

3) L’ENCADREMENT DES PRODUCTEURS PUBLICS

Le producteur public ne doit pas devenir une aubaine pour les diffuseurs ni servir à être capté in fine par des majors. Il doit s’adresser avant tout aux artistes « non rentables ».

Il doit articuler ses missions en bonne intelligence avec les autres dispositifs, notamment les SMAC qui ont certaines missions similaires.

Dans la mesure où il salarie des artistes et technicien·nes, il est de fait producteur de spectacles, et doit donc prendre à sa charge l’intégralité de ce que ce rôle représente, ainsi toutes les missions du paragraphe 2.3 ne peuvent être décorrélées.

À ce titre, un système de guichet avec des « comptes artistes » où ces derniers gèreraient leur propre trésorerie est exclu : le producteur public doit avoir la main sur l’ensemble de son budget et sa ventilation entre les artistes qu’il défend. La qualité de producteur-employeur de ce dispositif implique aussi de détenir une (des) licence(s) d’entrepreneur de spectacles.

CONCLUSION

Nous pensons aujourd’hui que la création d’un tel service public de production est une nécessité pour que les artistes puissent faire face au monde de la musique tel qu’il est, et vivre sereinement de leur métier. 62% des spectacles sont joués dans des salles de moins de 300 places. L’emploi dans le secteur « non rentable privé » est donc très important. Ces bureaux de production y ont une place essentielle. Ils permettront également de structurer le secteur occasionnel.

Il n’est cependant pas une fin en soi, et doit impérativement s’accompagner

  • de garde-fous et de systèmes incitatifs (aides à l’emploi, fléchage des subventions) qui conduisent les organisateurs de spectacles à pratiquer l’emploi direct le plus souvent.
  • d’une campagne enfin efficace de lutte contre le travail illégal
  • de politiques publiques ambitieuses à toutes les échelles et sur tous les territoires, au service de la diversité.
  • de l’élargissement du Guso aux petites structures de spectacle vivant.
  • Un travail revendicatif et d’élaboration sur le bon recours, le contenu et la légitimité des contrats de cession
  • Au-delà devra se poser la question de l’activité dans le secteur phonographique pour ces structures.