La propriété intellectuelle

par Marc Slyper

La fonction traditionnelle de la négociation collective en matière de droit des artistes interprètes et le rôle historique du SNAM-CGT dans la création de la SPEDIDAM

Dans les années 50, malgré des protocoles d’accord, l’évolution rapide de la technique industrielle a pesé de plus en plus sur la vie professionnelle des artistes musiciens qui sont entrés en conflit, à l’appel du SNAM CGT, avec l’industrie et le commerce phonographiques. Cette lutte a abouti à la conclusion d’un protocole d’accord sur l’enregistrement entre le SNICOP (Syndicat national de l’industrie et du commerce phonographiques) et le Syndicat national des artistes-musiciens de France et d’Outre-Mer (SNAM), signé le 17 avril 1959.

Ce protocole a été complété par un protocole complémentaire sur la sonorisation de tous les films cinématographiques signé entre le SNICOP et le SNAM le 17 juillet 1959. C’est à cette époque que le SNAM crée la SPEDIDAME : « Afin que les droits de tous les artistes musiciens soient également défendus elle a été créée (la SPEDIDAME) extérieurement au SNAM et il suffira à quelque musicien que ce soit d’y être adhérent pour pouvoir, le cas échéant, bénéficier des droits que nous venons de faire reconnaître (…) ».

Les mobilisations, les manifestations, les  » interdits professionnels « , à l’initiative du SNAM-CGT, sur l’application et l’interprétation des accords Snam-Snicop de 1959, la grève des enregistrements en 1966 ont permis d’obtenir l’accord de 1969 sur l’enregistrement et ont participé à la définition des droits de propriété intellectuelle des artistes interprètes de la musique. Cela a constitué une des bases fondamentales pour l’élaboration de la loi de 1985 sur les droits voisins du droit d’auteur.

La dénonciation de l’accord SNAM-SNICOP du 1er mars 1969 et l’échec de la politique des apports décidée en 1994 par la direction de la SPEDIDAM

Le SNEP (ex-SNICOP) a dénoncé l’accord du 1er mars 1969 qui, par conséquent, a cessé de s’appliquer le 30 juin 1994 et la négociation d’un nouvel accord qui a suivi a échoué.

Depuis lors, tirant parti de ce qu’il n’existait plus de convention collective protectrice des intérêts des artistes interprètes, les producteurs de phonogrammes imposent aux artistes interprètes de la musique des contrats de cession globale de leurs droits exclusifs.

Pour tenter de s’opposer à ce chantage à l’emploi des producteurs, la SPEDIDAM proposait en 1994 à ses membres de lui faire apport de leurs droits de la manière la plus étendue. La note explicative sur la transformation des mandats statutaires de la SPEDIDAM en apport précisait : « C’est seulement en cas d’apports (c’est-à-dire cession) des droits à la SPEDIDAM que les mêmes droits ne peuvent plus être cédés individuellement à des producteurs… les artistes interprètes de la musique et la SPEDIDAM ne peuvent que sortir renforcés par cette transformation statutaire ».

Quatorze ans après, force est de constater que l’objectif est très loin d’être atteint puisque la quasi-totalité des contrats de travail proposés par les producteurs de phonogrammes et signés par les artistes interprètes continuent d’imposer une cession globale des droits exclusifs à leur profit. L’échec de la stratégie de la direction de la SPEDIDAM est patent.

Dans ce contexte le Snam-Cgt a négocié et signé la convention collective de l’édition phonographique. Accord unique au niveau international, cette convention collective garantie aux musiciennes et musiciens leurs salaires et leurs droits de propriété intellectuelle. Cette convention encadre le salaire d’enregistrement et le droit de fixation, les salaires pour rémunérer les droits de mise à disposition du public pour toutes les utilisations possibles, des rémunérations proportionnelles aux recettes d’utilisations mises en gestion collective par les producteurs (unique dans le monde), 1% des bénéfices, les rémunération du fonds de catalogue, enfin la prévision d’un fonds d’aide à l’emploi pour enregistrement grâce à l’apport des irrépartissables musicien·nes du fonds de catalogue mais aussi un accord pour les captations à l’initiative des producteurs de phonogramme.

Suite à cette signature la Spedidam et le Samup ont attaqué le Snam-Cgt en recourant aux moyens de la société civile pour nous « tuer » et nous faire disparaître. Procès, droits de réponse, campagne d’opinion et de pétitions mensonger·es EN VAIN.

Bien au contraire le Snam-Cgt a gagné et occupé une place centrale et reconnue sur ce qui touche aux droits de propriété intellectuelle des ARTISTES INTERPRETES de la MUSIQUE.

Ainsi notre rôle a été fondamental et central dans :

  • Loi Hadopi no 2009-669 du 12 juin 2009 et le rapport Olivennes
  • 13 engagements pour la musique 17 janvier 2011 (mission Hoog)
  • Protocole d’accord issu de la médiation SCHWARTZ : Pour un développement équitable de la musique en ligne 2 octobre 2015
  • Annexe musicien·nes à la convention collective nationale de l’audiovisuel (2015)
  • Partie de la loi LCAP du 7 juillet 2016 sur modification du code de la propriété intellectuelle, reprenant les propositions du Snam-Cgt et instituant la GRM (garantie de rémunération minimum pour streaming).
  • Négociations GRM 2017 et celles d’aujourd’hui (rôle principal du Snam-Cgt avec l’Adami).

Mais aussi :

  • Mission et rapport Lescure sur offre légale en ligne 14 mai 2013
  • Mission Phéline 18 décembre 2013.
  • Participation reconnue aux activités du CSPLA (conseil supérieur de la propriété intellectuelle).

Tout ceci représente des acquis essentiels d’avant-hier, hier et aujourd’hui de notre syndicalisme CGT de métier : musicien·nes interprètes de la musique.

Marc Slyper