FOCUS Enseignants n°3 : Précarité
AVRIL 2021
Les enseignants artistiques subissent de multiples situations de précarité depuis tellement longtemps, et avec une telle persistance, qu’ils en oublient parfois les nombreuses variations.
Précarité de l’emploi. Depuis 1997, trois plans de résorption de l’emploi précaire dans la fonction publique territoriale se sont succédés. Chaque fois les enseignants artistiques arrivent en tête des cadres d’emplois concernés.
Précarité de l’emploi encore pour les salariés du secteur privé où la convention collective ECLAT (ex animation) n’est régulièrement pas respectée : pas de CDI alors que c’est la règle, modification unilatérale des horaires de travail, réduction du temps de travail obligée ou bien c’est la porte.
Précarité du statut. A première vue, beaucoup d’enseignantes et d’enseignants artistiques semblent bien lotis : fonctionnaires. Sauf qu’en 2018, un rapport du Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale rappelle la prévalence des contractuels, représentant 56,6 % des personnels de la filière enseignement artistique, tous cadres d’emplois confondus.
Précarité du contrat. Pour tous ces contractuels (dont la base légale est souvent non conforme), le CDD au dessus d’un mi-temps est la seule option possible. En effet, le CDI est éventuellement accessible mais seulement en dessous d’un mi-temps.
Précarité du statut de vacataire. Alors que l’enseignement artistique répond à un besoin permanent du public, qu’il déploie une pédagogie sur de nombreuses années d’études, on voit encore trop souvent des vacataires enseignants. Et c’est illégal. Le vacataire est le précaire absolu : pas d’indemnité de licenciement, variation constante du salaire, aucune garantie du renouvellement de son engagement d’un mois à l’autre. Il n’a qu’un seul droit, celui de se taire.
Précarité du salaire. Les contractuels sont très souvent recrutés sur le premier grade d’assistant d’enseignement artistique, à l’échelon le plus bas de la grille indiciaire sans évolution de carrière, avec régulièrement une rupture de rémunération durant l’été, droits sociaux calculés au 20/35ème, absence de régime indemnitaire.
Précarité du volume d’emploi. En ces années Covids, l’enseignement en télétravail est très dégradé. Les élèves abandonnent régulièrement. Les classes se vident petit à petit. A la rentrée 2021, en septembre, mécaniquement, tous s’attendent à une chute massive de leurs effectifs. Et aucune aide particulière n’est prévue par le gouvernement pour soutenir l’enseignement artistique en France.
Précarité des rythmes de travail. Régulièrement les employeurs remettent en cause les congés annuels des enseignants artistiques : ils bénéficieraient de trop de vacances. Régulièrement ils doivent se justifier, recommencer à expliquer le métier, la préparation pédagogique, les activités accessoires nécessaires, le travail tardif en soirée, les années d’études, l’entretien instrumental. Et pour le secteur public, toujours aucun cadrage réglementaire national.
Précarité accentuée par une mobilité souvent obligée. Les emplois à temps non complet sont très fréquents, un sur deux. Du coup les déplacements professionnels contraints touchent largement la profession. Les remboursements kilométriques, lorsqu’ils existent, sont dérisoires et ne remboursent ni la fatigue ni les temps de trajet.
Précarité de la santé mentale des enseignants. Il est démontré que ce métier est sujet aux risques psychosociaux plus que la moyenne : une forte intensité du métier, des exigences émotionnelles plus importantes, manque de soutien hiérarchique et entre collègues, perte du sens du travail, isolement, perturbation de la vie personnelle.
Précarité pour les femmes enseignantes. Les enseignants artistiques sont aussi des enseignantes artistiques, touchées elles aussi par des salaires plus faibles, des carrières plus longues, des retraites moins confortables, des responsabilités moins importantes.
Précarité en matière de formation professionnelle. L’informatisation et la technicité sont des outils de plus en plus présents dans ce métier. Mais les formations restent rares, mal adaptées, et souvent payantes. Le sentiment de décrochage professionnel renforce l’insécurité au travail. Et, bien sûr, la participation financière des employeurs au financement de ces nouvelles technologies est rare.
Le SNAM regroupe les musiciens et musiciennes quel que soit leur métier : interprètes et/ou enseignants, qu’ils relèvent de l’emploi permanent ou qu’ils soient intermittents du spectacle, fonctionnaires ou employés du secteur privé. Cette polyvalence permet de défendre les professionnels de la musique en tenant compte de tous les champs d’activités qu’ils rencontrent.
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N°3 – Avril 2021