La solidarité avec le peuple Ukrainien confronté aux atrocités d’une guerre cruelle ne peut justifier l’exclusion des artistes et de la culture russe des scènes internationales.

 Publié le : 23 Mar 2022  

En accord total avec la Fédération Internationale des Musiciens, le SNAM-CGT appelle les artistes musiciens et les institutions musicales de France à prendre toutes les initiatives susceptibles d’apporter une aide concrète aux victimes de l’invasion par l’armée russe de l’Ukraine.
Nous dénonçons avec force cette guerre injustifiable et les exactions commises à l’initiative d’un régime autoritaire avec lequel nous n’avons aucune complaisance.
Pour autant, aux USA, au Canada, en Pologne, en Italie, au Royaume Uni, mais aussi en France, des artistes ou des œuvres du répertoire russes sont déprogrammés.
Nous pouvons comprendre, compte tenu du contexte que certaines personnalités du monde de la culture ou du sport, ayant publiquement exprimé leur appui au Président Poutine et à sa politique d’annexion de l’Ukraine, puissent être visées par de telles mesures d’exclusion. Mais pour l’immense majorité des autres, on ne peut ignorer que les injonctions faites aux artistes résidant en Russie de se positionner sur le conflit les mettent potentiellement, eux et leurs familles, en proie à la répression du pouvoir autoritaire russe.
Et au delà du sort de ces artistes, il nous apparaît totalement illégitime que l’on assimile dans ce mouvement d’exclusion toute la culture séculaire de la Russie, tous ses auteurs, tous ses compositeurs, tous ses intellectuels, à un régime pour lequel ils et elles n’ont pas manifesté le moindre soutien.
Durant la première guerre mondiale, en 1916, le compositeur Maurice Ravel avait publiquement exprimé son refus de participer à une campagne qui visait à « condamner au silence l’Allemagne moderne pangermaniste»
Il nous appartient à notre tour de nous ériger contre cette stigmatisation d’œuvres ou d’artistes au nom de leur seule nationalité.
Faudra-t-il sinon exclure les artistes chinois en raison de la répression des Ouïghours, les interprètes turcs qui n’auraient pas reconnu le génocide des arméniens ou les compositeurs français, espagnols, anglais ou portugais du XVIIIème siècle complices des politiques esclavagistes de leurs souverains ?
C’est au contraire en défendant la pluralité des répertoires, en refusant de rentrer dans la logique de confrontation des peuples que nous pourrons manifester notre opposition aux totalitarismes de quelque nature qu’ils soient.
Le SNAM-CGT interpelle la Ministre de la Culture, les élus territoriaux ainsi que toutes et tous les responsables des institutions musicales françaises pour qu’ils ne cèdent pas aux tendances les plus populistes d’une culture de l’exclusion et qu’en dépit de la violence inouïe de ce conflit, ils permettent que s’expriment par la musique, dans toute sa diversité, les valeurs d’universalisme et d’humanisme  porteuses d’avenir et de paix.
Paris, le 23 mars 2022