CNM : NON AU PASSAGE EN FORCE, OUI A LA CONCERTATION !

 Publié le : 13 Oct 2018  

(communiqué commun  CGT Spectacle)

Le rapport «Création musicale et diversité à l’heure numérique» qui vient d’être publié a déjà suscité de nombreux articles de presse et diverses prises de positions. Nicolas Sarkozy a, sans attendre, souhaité que le Centre National de la Musique (CNM) puisse démarrer son activité dès 2012. A cet effet, il vient d’indiquer que la mission de préfiguration sera lancée avant la fin du mois d’octobre.

La Fédération CGT du Spectacle et ses syndicats – dont le Snam, le Sfa et le Synptac – s’opposent avec la plus grande vigueur tant à la méthode du passage en force qu’à l’absence totale de concertation sur la création de cet établissement public. En effet, si nous ne sommes pas a priori hostiles à la création d’un CNM comme en atteste les contributions de nos syndicats d’artistes – Snam et Sfa – à la mission «Selles, Chamfort, Colling, Thonon, Riester», nous estimons que la succession d’auditions d’une heure ne peut faire office d’une réelle concertation avec les organisations professionnelles. Le sujet traité par la mission est pourtant suffisamment important pour que la concertation ait lieu, parce que la création du CNM entraînerait la disparition du Fonds pour la Création Musicale, des centres ressources et du Centre National des Variétés (CNV).
Ce rapport nous inspire les quatre réflexions suivantes :

Sur la gouvernance

Depuis des années la vitalité des organismes de soutien, dont le CNV, repose sur l’administration partagée, dans sa gouvernance. C’est bien par exemple un CNV au service de nos professions et administré par nos professions, avec l’État et les collectivités territoriales et en bonne collaboration avec l’administration, qui a permis de construire des dispositifs de soutien pertinents, en permanence analysés et rediscutés, notamment au comité des programmes, dans les commissions et au CA.
Rappelons, dans le même esprit, le rôle de la concertation, du travail en commun, notamment au sein du Conseil National des Professions du Spectacle (dont le décret n’est pas respecté et dont la séance plénière est devenue optionnelle), qui a pourtant permis à contribuer à la mise en oeuvre de la réforme de l’Ordonnance de 45, la mise en place du GUSO ou encore aux « Entretiens de Valois » dont le ministre se gargarise…
La récréation est sifflée. Exit les organisations professionnelles. Demain toute décision (choix des programmes, choix de la répartition des sommes affectées aux différents programmes ou dispositifs) sera concentrée entre les seules mains de l’État. Toute décision d’attribution des aides sera le fait du seul Président du CNM et d’un Conseil d’Administration à ses ordres.
C’est de fait l’abandon de pratiques qui ont pourtant fait preuve de leur efficacité. Ce rapport, qui se propose de défendre la diversité artistique, la diversité des modèles économiques dans la filière musicale, se contredit totalement en excluant les organisations professionnelles.

Sur les moyens

Il est proposé d’affecter une part de la taxe sur les services de télévision acquittés par les Fournisseurs d’accès Internet (FAI) au profit de la mise en place du CNM pour un budget total qui serait de l’ordre de 145 Millions d’Euros. Peut-on sérieusement penser que cela pourrait se réaliser sans la moindre concertation avec les organisations professionnelles du cinéma et de l’audiovisuel ?
De surcroit, cette taxe transiterait par les caisses de l’État qui, selon nos informations, veut faire main basse sur 70 millions d’Euros d’«excédents» du CNC et 50 millions d’Euros de France Télévisions, alors que ces sommes disponibles justifieraient pleinement que s’engage une réflexion sur les missions et les financements de deux établissements éminents qui ne semblent être considérés par Bercy que comme de vulgaires mallettes à billets.

Sur la cohérence avec l’autre mission ministérielle sur le « financement du spectacle vivant »

Celle-ci vient à peine de commencer ses travaux. Force est de constater que l’Etat n’a jamais clairement explicité les rapports entre un fonds de financements qu’il qualifie « d’externes » et le service public de la culture, ses missions, ainsi que le financement public des responsabilités tant de l’Etat que des collectivités territoriales.
Il n’est pas question pour nous d’accompagner dans les dispositifs décrits par la mission sur la filière musique, une remise en cause du service public et un désengagement financier de l’Etat.
Sans être hostiles à la mise en oeuvre de programmes destinés à soutenir en particulier la diffusion et l’emploi, nous ne pouvons que constater que la question du financement du spectacle vivant (théâtre, danse, musique savante, arts de la rue, cirque, mime, marionnettistes…) reste entière.

Sur la répartition des aides

Dans le rapport proposant la création du CNM tout est déjà bouclé: répartition des sommes, droits de tirage et aides sélectives, diversité des programmes, fonctionnement, et ce sur la base d’analyses et de chiffres qui sont contestables. Par exemple, sur la question des formations artistiques, le parti pris du rapport de ne tenir compte que du Studio des Variétés et du Fair, au-delà du travail excellent qu’ils réalisent, est particulièrement ridicule. En effet, le rapport omet d’évoquer le travail des conservatoires, des réseaux d’écoles, des centres de formation sur tout le territoire national et ignore superbement le rôle de l’AFDAS et des CPNEF.
Nous ne sommes absolument pas convaincus que la répartition des sommes et des aides telles qu’avancées par la mission favoriserait la diversité, l’emploi et la structuration professionnelle. Enfin, si nous savons ce qui disparaîtrait (le CNV et d’autres organismes), l’avenir que l’on nous promet, convenons en, est à tout le moins incertain, sinon périlleux.
Face à ce passage en force, la Fédération CGT du Spectacle et ses syndicats demandent la convocation d’urgence du CNPS en séance plénière et dans cette attente de surseoir à toute communication sur la création du CNM.

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