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FONPEPS : enterré avant d’être tout-à-fait mort ?

 Publié le : 12 Déc 2017  

Le SNAM-CGT dénonce l’absence d’ambition du ministère de la culture dans la mise œuvre du « fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle » (FONPEPS) dans le secteur musical et demande l’ouverture immédiate d’une négociation tripartite avec l’Etat et les organisations d’employeurs du secteur public de la musique.

Depuis sa création en 2016, ce dispositif a eu un effet nul sur l’emploi artistique dans les nombreux ensembles musicaux dont l’activité est permanente mais dont les membres sont tous des précaires. L’assurance-chômage continue donc indûment à cofinancer ces formations en versant continuellement des allocations à leurs membres.

En septembre 2016 l’Etat annonçait la mise en place du FONPEPS destiné à « favoriser l’emploi durable dans le spectacle » dans le but de « lutter contre la précarité de l’emploi de ceux qui œuvrent à la création française ». Plus d’un an après, le bilan est extrêmement décevant comme en témoignent les montants ridiculement bas des dépenses effectivement engagées par l’Etat (on parle de 2,5 millions d’euros en 2017 alors qu’à l’origine on en prévoyait 90 !). Selon nos informations, au niveau national, le nombre d’artistes-musiciens à avoir bénéficié de la mesure de création de poste en CDI est de zéro. 
 
Pendant ce temps de nombreux orchestres continuent à fonctionner avec 100% de musiciens sous statut précaire.

C’est toujours le cas de certains ensembles spécialisés qui développent une activité quasi permanente. À ce titre, la Fédération des ensembles vocaux et instrumentaux spécialisés (FEVIS), vient, elle-même, de publier des statistiques indiquant qu’elle emploie chaque année des artistes de la musique dans un volume de 600 équivalents temps plein (!) tout en n’ayant pas un seul artiste-musicien employé à plein temps en CDI. Certains de ces ensembles ont pignon sur rue depuis des décennies et bénéficient de subventions publiques dans un volume conséquent. On pense par exemple à l’Orchestre des Champs Élysées, Les Musiciens du Louvre, ou les Arts Florissants. L’état peut-il se satisfaire de cette situation institutionnalisée qui pèse lourdement sur les comptes de l’assurance chômage au risque de fragiliser le système ? 
 
Mais il y a pire : d’autres formations ont recours à la fois à des enseignants et à un volume important d’intermittents alors qu’ils sont implantés dans des villes ou des régions dont la population importante justifierait l’existence d’un orchestre permanent. C’est par exemple le cas à Saint Étienne, Tours, Pau, Besançon ou en Poitou-Charentes. Ces orchestres qui dépendent des collectivités locales et sont cofinancés par L’État sont les outils du Service Public de la culture sur les territoires tels que définis par la loi « Liberté de Création – Architecture – Patrimoine » (LCAP) de juillet 2016. Pourtant leur personnel artistique est engagé au cachet à l’occasion de chaque concert ou série de concerts, tout en pointant au chômage le reste du temps pour la plupart d’entre-eux. Pourquoi n’est-il pas possible d’avoir recours au FONPEPS pour faire cesser ces situations socialement inacceptables ?

Les ensembles permanents sont aussi directement concernés. Entre les postes gelés et les postes non pourvus par concours et occupés quotidiennement par des intermittents, ce sont des dizaines d’emplois pérennes que pourrait générer une mise en œuvre résolue du dispositif.
 
L’État avait aussi évoqué un temps un « plan chœurs » pour constituer – enfin – en France un ensemble vocal professionnel destiné au répertoire symphonique. Face aux menaces pour l’emploi que représente l’ouverture aux amateurs des scènes lyriques prévue par la loi LCAP, un tel projet avait suscité l’espoir d’une profession sinistrée. Passés les effets d’annonce aucune initiative n’est venue prolonger cette promesse.
 
Mais qu’attend-on pour redéployer les FONPEPS en direction de l’emploi artistique dans le secteur musical ? 
 
On parlait l’an dernier de 90 millions en année pleine. Le budget 2018 n’en prévoit plus pour l’instant que 25. Si l’État ne modifie pas immédiatement les critères d’attribution on peut se demander si même la moitié sera dépensée. En ne mettant en œuvre aucun plan, en n’initiant aucun projet pour donner à ce dispositif une traduction concrète pour l’emploi permanent d’artistes, le Ministère de la Culture entend-il faire la démonstration par le vide de l’inutilité du FONPEPS ? On voudrait enterrer ce dispositif avant qu’il soit tout-à-fait mort qu’on ne s’y prendrait pas autrement.
 
Alors que les besoins sont immenses et que le nombre de recours abusifs à la « permittence » ne cesse de croître, le SNAM-CGT revendique l’ouverture immédiate de négociations entre l’État et les organisations professionnelles du secteur musical pour affecter réellement une part conséquente du FONPEPS à l’emploi artistique permanent et sortir, comme s’y était engagé le gouvernement, de nombreux artistes de la musique de la précarité. A l’heure où l’on commence à nous resservir les vieux arguments selon lesquels les intermittents sont une charge trop importante pour le régime d’assurance chômage, nous constatons une fois de plus qu’il s’agit d’un choix fait au plus haut niveau. Les musiciens et les musiciennes n’en sont pas les responsables, elles et ils en sont les victimes.

Le 12/12/2017